Press A Bruxelles, l’UE risque d’avoir d’autres priorités

News | 28-08-2020 in AGEFI

Deux députés européens avertissent que la Suisse pourrait à nouveau être privée des fonds de l’Europe, en cas de oui à la proposition de loi de l’UDC.

Sophie Marenne

Si l’ombre de l’initiative de limitation inquiète les écoles et universités de Suisse, l’appréhension atteint aussi Bruxelles, jusqu’au coeur du Parlement européen. «On n’atteint pas l’excellence en s’isolant», avertit Maria da Graça Carvalho, députée européenne. Spécialiste des questions de recherches, l’ancienne professeure de l’Université technique de Lisbonne est convaincue que, pour conserver sa compétitivité, la Suisse doit travailler avec ses voisins. «Ce n’est pas une question de budget mais de sciences», argue l’élue du Parti populaire européen. «Le bénéfice de la participation de la Suisse aux programmes-cadres de recherche (PCR) dépasse largement les quelque 650 millions d’euros qu’Horizon 2020 (H2020) a déjà alloués au pays», estime la politicienne de centre droit, précédemment ministre de l’enseignement au Portugal. «Prendre part aux consortiums, attirer les meilleurs étudiants européens, être en réseaux avec les chercheurs du continent et échanger des informations avec eux: ces éléments ont une valeur ajoutée qui n’a pas de prix.»

Membre de la Commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie (ITRE), la Portugaise suit de près l’évolution des relations helvetico-européennes. «La Suisse est associée aux PCR depuis leurs débuts, fin des années 70. J’ai pu constater l’anxiété des chercheurs, tant côté suisse qu’européen, lors de l’interruption d’H2020, entre 2014 et 2016.» Après la votation contre l’immigration de masse, les scientifiques du pays s’étaient vu refuser l’accès à certains des mécanismes, la mobilité étant une condition sine qua non. Avant qu’une solution ne soit trouvée.

Aujourd’hui, la Suisse est le pays associé qui bénéficie le plus d’H2020, en termes de participations, coordinations et financements de projets. Devant la Norvège et Israël. Et si l’on considère à la fois les pays de l’UE et ceux associés, la Suisse se classe au 8e échelon du nombre de participations, entre la Belgique et le Danemark (voir graphique). «Cette position privilégiée de la Suisse fait des jaloux. Suite au Brexit, les Britanniques réclament un traitement similaire», relève Christophe Grudler, député du groupe Renew Europe. Or le budget d’Horizon Europe, qui succédera à H2020, est en négociation. Le politicien centriste souligne qu’il est difficile de savoir si les 27 laisseront la Suisse conserver son statut de pays associé ou si elle sera reléguée au rang de pays tiers, afin de ménager le Royaume-Uni.

Au-delà de la votation du 27 septembre, ce Français originaire de Belfort craint surtout un rejet définitif de l’accord-cadre qui pourrait être négocié derrière. «Bien que nous soyons un certain nombre de parlementaires à temporiser, la lenteur de décision suisse pèse sur ce dossier Face à d’autres préoccupations comme la crise du Covid-19 ou la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis, l’UE risque de jeter l’éponge pour mettre ses priorités ailleurs.»

Or, Christophe Grudler ajoute que le moment pour être exclu des PCR serait très mal choisi: «Horizon Europe promet d’être le meilleur programme de recherche au monde.» Alors que le budget d’H2020 était de 65,5 milliards d’euros, on parle de 75,9 milliards pour Horizon Europe, auquel s’ajouteront 13,5 du nouvel instrument de relance Next Generation. En parallèle, Erasmus+ s’est aussi vu largement renforcé: passant de 13,9 à 21,2 milliards après 2020. «Ces deux programmes montent en puissance et représentent des opportunités de financement bien plus importantes, comme autant de nouvelles chances à saisir», commente-t-il. Un train que la Suisse ne doit pas rater, selon les députés.

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